L’obtention de l’Investment Grade montre que le Maroc est bel et bien présent dans les radars des investisseurs étrangers. C’est donc une preuve de confiance. Mais est-ce suffisant pour attirer massivement les opérateurs internationaux? Tout porte à croire que l’on s’éloigne de plus en plus du contexte de crise. Ce qui plaide en faveur d’une relance du marché de l’immobilier. Mais valeur aujourd’hui, le constat est que les acquéreurs préfèrent attendre des jours meilleurs. Les promoteurs enregistrent plusieurs reports d’acquisition. Ce qui retarde la véritable reprise.
De l’avis de nombre d’investisseurs et acquéreurs potentiels étrangers, le marché marocain reste très atypique. «Nous rencontrons régulièrement plusieurs d’entre eux, qui réclament plus de transparence», déclare Karim Beqqali, DG de CB Richard Ellis Maroc (CBRE Maroc). Une filiale du groupe qui revendique le statut de numéro un du conseil dans l’immobilier. Et pour contribuer au débat autour de la question de la transparence, la filiale a organisé un séminaire à Casablanca. La rencontre a été l’occasion de dévoiler la première étude réalisée par CBRE Maroc sur le marché de l’immobilier marocain à travers tous ses segments: résidentiel, retail, industriel & logistique, bureaux, hôtelier. «Le but de Market View Maroc est de fournir aux investisseurs tant nationaux qu’internationaux un outil à la décision, indépendant et transparent», déclare Beqqali. Au niveau du résidentiel, l’étude CBRE Maroc révèle l’inadéquation entre l’offre et la demande, principalement en termes de qualité et de prix. Cette inadéquation a été à l’origine de la correction des prix. Un redressement tout de même salutaire, qui a permis le retour à la réalité des prix à des niveaux plus réalistes, essentiellement dans les marchés touristiques. Au cours de la période faste, les produits du haut standing, malgré l’absence de qualité, s’écoulaient à un rythme assez soutenu. Actuellement, les acquéreurs sont plus exigeants sur le plan de la qualité et des prix, étudient toutes les offres avant de reporter parfois leur décision d’achat. Depuis 2009, le profil de l’acquéreur a changé. La demande pour ce type de logement est essentiellement assurée par le marché intérieur. Au moment où le haut standing connaît une forte contraction, les segments économiques, moyen et social, continuent de représenter un fort potentiel. Il faut rappeler que le déficit en logement, cumulé depuis de nombreuses années, s’élève à 1 million d’unités. Un chiffre qui croît de plus de 60.000 nouvelles demandes chaque année.
- Résidentiel domestique
L’analyse de CBRE Maroc montre qu’à Casablanca, par exemple, le marché du résidentiel domestique n’a pas été impacté par la crise immobilière. De plus, l’offre haut standing reste relativement faible par rapport à la demande. Toutefois, d’importants projets sont actuellement en cours de construction à Bouskoura et Dar Bouazza. Les prix y sont moins élevés. Ce qui explique la vente de plus de 60% des stocks de première phase. Pour sa part, Rabat se caractérise par une demande croissante sur le haut standing. Le déficit de la capitale politique en logements explique le rythme élevé des ventes. Pour rappel, les projets Ryad Al Andalous et Bab Al Bahr représentent à eux seuls 60% du stock global pour ce segment.
- Offre de bureaux
L’offre de bureaux à Casablanca s’élève actuellement à 1 million de m2, hors administrations publiques. Il s’agit majoritairement d’immeubles dont la superficie totale n’excède pas les 8.000 m2. Un marché réparti sur cinq principales zones : ancien centre, nouveau centre, quartier des banques, Sidi Maârouf et Aïn Sebaâ. Selon les experts de CBRE Maroc, le marché de l’immobilier professionnel a enregistré ces dernières années l’arrivée de nouveaux acteurs. Les fonds d’investissement et foncières spécialisés dans l’immobilier professionnel, intéressés par des actifs à rendement locatif. L’arrivée de nouveaux opérateurs a généré une offre locative plus adaptée aux besoins des investisseurs. Les taux de rendement recherchés par les investisseurs varient entre 8,5 et 11%, en fonction de la catégorie du bien, ses caractéristiques, la qualité des prestations… Cependant, «il n’y a pas de rotation dans le secteur de l’immobilier professionnel et le marché a besoin de stocks», explique Edwin Farrelly, analyste auprès de CBRE. En effet, le rythme de construction de bureaux à Casablanca reste faible. Elle s’explique essentiellement, comme pour les autres segments d’ailleurs, par la rareté et la cherté du foncier. De plus, au cours de la période 2009-2010, les prix de location et de vente se sont stabilisés malgré une légère baisse du volume des transactions locatives. La demande provient principalement des PME, qui sont à la recherche de locaux de 80 à 200 m2. Par ailleurs, bon nombre d’entreprises souhaiteraient changer de siège, mais sont contraintes de rester dans leurs bureaux faute d’alternative conforme à leurs attentes en termes de prix, de proximité, de surface, d’image et de normes. A signaler à ce titre que plusieurs projets sont actuellement en cours de construction dans plusieurs zones de Casablanca. Ce qui va représenter une offre supplémentaire de 300.000 m2 à l’horizon 2014. Parmi ces projets, Casanearshore, Anfa Place, Gare Casa-Port, la Marina de Casablanca... Les projections de CBRE ne tiennent pas compte de la place financière de Casablanca dont la construction est prévue dans l’ancien aéroport d’Anfa.
- Industriel
Autre segment passé à la loupe du cabinet de conseil, l’immobilier industriel et la logistique. Le pays compte actuellement 79 zones industrielles, dont 61 sont urbanisées et équipées, 6 en cours de viabilisation et 12 prévues dans les prochaines années. Cependant, l’essentiel de ce segment ne répond pas aux standards internationaux. C’est la raison pour laquelle le ministère du Commerce et de l’Industrie a mis en place le programme d’aménagement des zones industrielles de deuxième génération (P2I) pour répondre aux attentes des investisseurs étrangers. La disponibilité d’une offre sur mesure a d’ailleurs permis l’arrivé de plusieurs entreprises internationales telles que Yamazaki, Sumitomo, Lear, Faurecia…
- Retail
Au Maroc, la faible offre en centres commerciaux structurés est à l’origine du développement du marché du retail, conjuguée au développement du pouvoir d’achats et le changement dans les habitudes des consommateurs. Les opérateurs, propriétaires de marques internationales telles que Zara, Celio ou Carrefour, sont peux nombreux, mais dominent le marché. Par ailleurs, des groupes marocains commencent à s’affirmer sur ce créneau. Il s’agit, par exemple, de Kitéa, qui a ouvert 3 nouveaux magasins en 2009, d’une superficie moyenne de 1.500 m2. Les grandes marques s’implantent essentiellement dans des quartiers tels que Maârif, Racine ou encore Gauthier. Les projets, comme Anfa Place, Morocco Mall, Carré Ede…, qui seront achevés entre 2011 et 2013, auront un impact certain sur le segment du retail. Totalisant environ 190.000 m2, ces projets représenteront la première vague de centres commerciaux conforme aux standards internationaux.
- Hôtellerie
Le Maroc a mis en place le plan Azur qui visait la construction de 100.000 lits, dont 73.000 dédiés aux hôtels. Un programme étendu par la suite à trois nouvelles stations balnéaires. Mais la crise étant passée par là, les opérateurs étrangers ont dû céder leurs projets au profit d’investisseurs locaux. Il s’agit, entre autres, de Saïdia et de Port Lixus, qui ont été respectivement récupérés par les groupes Addoha et Alliances Développement Immobilier. Malgré ses difficultés, le plan Azur a permis la création de projets touristiques de grande envergure. Certains ont déjà connu un grand succès, tels que les stations Saïdia et Mazagan. Gérée par le groupe Kerzner, Mazagan table à elle seule sur 4 millions de touristes. «Le plan Azur aura permis de créer 70.000 lits supplémentaires d’ici fin 2010, d’atteindre environ 94% des 10 millions de touristes prévus. De plus, les recettes sont également au rendez-vous», déclare Jouada Ziati, DG du groupe Addoha.
Financement
Le Maroc est engagé dans nombreux plans sectoriels: Maroc Vert, Halieutis, Emergence, stratégie logistique... Ce qui génère une forte tension sur les liquidités et donc les crédits bancaires dédiés aux investissements immobiliers. Où trouvera-t-on donc l’argent pour financer les projets hôteliers? D’aucuns accusent d’ailleurs les banques d’être frileuses en matière de crédit dédié aux projets touristiques. S’y ajoute la rareté de fonds d’investissement sophistiqués. Pour Youssef Rouissy, directeur de la Banque de financement d’Attijariwafa bank, les instruments financiers sont bel et bien disponibles. Outre le professionnalisme des investisseurs, l’existence d’un réseau commercial, d’autres paramètres sont tenus en compte dans la décision ou non d’octroi d’un crédit immobilier. «Au-delà des garanties que peut présenter un projet, la vitesse d’écoulement est un élément de plus en plus important», explique-t-il.
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